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Une petite fille serre sa maman dans ses bras. Elle sourient toutes les deux.

Cancer du sein : vers une médecine toujours plus ciblée

Maladies graves ou chroniques / Cancer

La prise en charge du cancer du sein a profondément évolué ces dernières décennies. Partenamut a rencontré deux spécialistes pour faire le point sur ces grandes avancées, les progrès en cours et les défis actuels.

Entretien avec deux spécialistes du cancer du sein 

Dr Daphné t’Kint de Roodenbeke est oncologue médicale spécialisée en cancer du sein à l’Institut Jules Bordet. 

Dr Nassim Bengrab est médecin généraliste et exerce à la Clinique de Prévention et de Dépistage de l’Institut Jules Bordet dont il est également le coordinateur. 


Qu’est-ce qui a le plus changé dans la prise en charge du cancer du sein ces dernières années ?

Dr t’Kint : Beaucoup de choses ! D’abord, l’évolution des techniques de dépistage avec des mammographies moins irradiantes, combinées parfois avec de l’intelligence artificielle. Ensuite, au niveau des chirurgies, en 50 ans, on est passé de la mastectomie radicale (retrait du sein) à la tumorectomie (retrait de la tumeur) avec des cicatrices beaucoup plus discrètes, voire presque invisibles. Au niveau des traitements, on évolue dans le même sens avec des radiothérapies plus ciblées et le développement d’autres options, moins lourdes que la chimiothérapie, comme les thérapies ciblées, l’hormonothérapie et l’immunothérapie.

La chimiothérapie n’est donc plus systématique ? 

Dr t’Kint: En effet. À cause de ses effets secondaires immédiats et de ses effets à long terme, on essaie de ne la proposer que lorsque c’est vraiment nécessaire. Aujourd’hui, on mesure mieux les effets à long terme de la chimio parce qu’il y a beaucoup de survivantes pour témoigner. On en tient compte. Avant d’entamer un traitement, on discute beaucoup avec la patiente pour évaluer les meilleures options. 

D’après vous, à quoi ressemblera cette prise en charge dans 10 ans ?

Dr t’Kint: On se dirige vers un renforcement des techniques de dépistage, avec des biopsies liquides*, pour arriver à repérer les tumeurs à des stades encore plus précoces. Les efforts se poursuivent pour proposer des traitements toujours plus précis et de moins en moins lourds.  

Dr Bengrab : On analysera aussi mieux les facteurs de risque génétiques, notamment grâce au Polygenic Risk Score (PRS)*. Ce n’est pas pour tout de suite, mais on peut dire qu’on évolue vers un dépistage de plus en plus personnalisé. 

*La biopsie liquide sert à détecter et à analyser les cellules cancéreuses dans un prélèvement de sang. C’est une technique non invasive. 

*Le PRS (score de risque polygénique, en français) permet de mesurer un ensemble précis de variations génétiques courantes pour évaluer les risques de maladie. 

Actuellement, identifiez-vous des points d’amélioration ? 

Dr Bengrab : On a la chance d’avoir un système de dépistage en Belgique, ce qui n’est pas le cas partout dans le monde, mais je pense qu’on peut encore l’améliorer. On voit clairement des disparités dans le suivi du dépistage. Au niveau des régions, déjà, mais aussi des classes sociales. Le message ne circule pas aussi bien qu’on le souhaiterait.  

Dr t’Kint : Oui, certaines femmes ne savent pas que le Mammotest est gratuit, par exemple. Et on sait que le coût de la santé est un frein, surtout dans les milieux défavorisés.  

Pourquoi parle-t-on encore si peu du cancer du sein entre proches ? 

Dr Bengrab: Il y a encore des tabous. Parler de sa maladie et de ses antécédents personnels, ça peut être perçu comme un signe de faiblesse. Dans certains milieux, les questions de santé ne sont pas prioritaires, on en parle moins. On est moins en contact avec le milieu médical aussi, les occasions d’ouvrir le dialogue sont plus rares. 

Dr t’Kint: Au-delà de la classe sociale, la mésinformation et les idées reçues sont de vrais obstacles au dépistage. N’oublions pas qu’on peut guérir du cancer. Plus il est repéré tôt, meilleures sont les chances de guérison.  

Dr Bengrab: Oui, le cancer est un mot qui fait peur, mais ce n’est pas une fatalité. C’est pour ça qu’il est important d’ouvrir le dialogue avec les professionnels de santé. Et Octobre Rose, ça sert vraiment à ça. À informer, à communiquer, à dédramatiser et à combattre les idées reçues. 

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