Tous les Belges sont-ils égaux devant la santé ? Non, peut-on penser en découvrant les chiffres d’une étude des Mutualités Libres. Car en comparant les indicateurs santé pour des enfants bénéficiant d’une intervention majorée (BIM) et pour les autres, cette étude pointe des différences interpellantes. En partant du principe que ces enfants BIM font partie d’un groupe de la population a priori plus vulnérable, ces résultats montrent à quel point la lutte contre les inégalités doit aussi passer par une politique de prévention et de promotion de la santé mieux ciblée.
Soins dentaires : moins de prévention et caries plus fréquentes
Notre meilleure arme pour une bonne santé dentaire est sans aucun doute la prévention. Et cela passe par un suivi régulier par un dentiste, qui d’après notre étude est moins fréquent pour des enfants BIM.
Moins de visites préventives chez le dentiste
34 % des enfants de 3 à 6 ans bénéficiant de l’intervention majorée se sont déjà rendus chez le dentiste, pour 46 % chez les autres enfants. Et lorsque ces enfants de familles plus vulnérables y vont, c’est bien souvent pour soigner une carie, et pas pour effectuer des examens ou soins préventifs.
Deux fois plus de caries
Deux fois plus de visites pour traiter une carie … Pour les enfants de 1 à 6 ans bénéficiant de l’intervention majorée, le risque de souffrir d’une carie est nettement plus important : 24 % contre 12 % pour les autres enfants. Cet indicateur est directement lié à une autre donnée de l’analyse, à savoir les visites chez le dentiste qui sont moins fréquentes chez les enfants BIM, notamment pour des examens préventifs.
Mettre en avant la gratuité des soins dentaires
Et pourtant, les visites chez un dentiste conventionné pour la majorité des soins sont remboursées à 100 % pour les enfants de moins de 18 ans. Cela indique donc deux choses :
- cette gratuité des soins dentaires n’est probablement pas assez connue
- l’importance de la prévention pour la santé dentaire n’est pas suffisamment vue comme une évidence.
Moins de suivi par un médecin ou un pédiatre pour les bébés
L’étude des Mutualités Libres montre aussi que de 0 à 2 ans, 19 % des enfants nés dans une famille BIM ne sont suivis ni par un pédiatre, ni par un médecin. Chez les autres enfants, cette proportion tombe à 13 %. Cette différence peut être liée à un autre indicateur : dans cette même tranche d’âge, 40 % des enfants bénéficiaires de l’intervention majorée ont déjà été admis aux urgences d’un hôpital, contre 29 % dans les autres familles. On peut donc supposer que pour ces enfants BIM, ces visites aux urgences remplacent partiellement les soins de première ligne prodigués par le médecin ou le pédiatre de référence.
Plus souvent et plus longtemps à l’hôpital
Du côté des hospitalisations, on observe la même tendance. Le nombre d’hospitalisations est plus élevé pour les enfants de 0 à 2 ans bénéficiant de l’intervention majorée que pour les autres : 52 % en plus pour une admission classique et 38 % pour une hospitalisation de jour.
Par ailleurs, la durée moyenne d’une hospitalisation est aussi plus élevée pour ces enfants issus d’une famille a priori plus vulnérable : 5 jours pour les enfants BIM contre 3 jours pour les autres familles.
Un nombre plus élevé de grossesses précoces
Le nombre de grossesses et l’utilisation faite de moyens de contraception remboursés illustrent aussi les différences entre enfants BIM et non BIM. Chez les filles de 14 à 20 ans bénéficiaires de l’intervention majorée, le nombre de grossesse est 3 fois plus élevé que pour les autres. Là aussi, cet indicateur peut logiquement être lié avec un autre : les contraceptifs remboursés, par exemple la pilule, sont nettement moins souvent utilisés par les filles BIM que par les autres (+50 %).
Une information qui ne passe pas assez bien ?
Vous l’aurez compris : ces chiffres indiquent clairement des inégalités dans l’accès aux soins de santé liés à des facteurs socioéconomiques... et ce malgré les avantages découlant du statut BIM et l’existence d’autres mesures censées gommer ces différences, et donc rendre l’accès à la santé plus égalitaire.
Parmi ces mesures, citons notamment…
Une prévention mieux ciblée, l’une des dix priorités des Mutualités Libres
Pour les Mutualités Libres, la lutte contre ces inégalités est une priorité. La prévention et la promotion de la santé sont au cœur des 10 priorités de santé publique mises en avant à quelques semaines des élections. Et cela doit aussi se traduire par des mesures ciblant spécifiquement les groupes plus vulnérables de la population.
On peut en effet supposer que les inégalités mises en avant par l’étude découlent en partie d’une information insuffisante sur ces mesures facilitant l’accès aux soins de santé. De même et toujours selon les Mutualités Libres, la littératie* en santé devrait être encouragée : « elle devrait mieux cibler les enfants et les jeunes, les familles monoparentales, les femmes enceintes, et ce grâce à une approche plus proactive, locale et transversale axée sur les besoins spécifiques du patient ».
BIM : l’ABC de l’intervention majorée
BIM, c’est quoi ?
BIM est l’acronyme de ‘bénéficiaire de l’intervention majorée’. Le statut BIM a succédé à ceux du VIPO et de l’Omnio.
Ce statut BIM permet à des personnes plus vulnérables de bénéficier de remboursements plus importants pour leurs soins médicaux : médecin, kiné, dentiste, médicament, hospitalisation… Le statut BIM permet aussi de bénéficier du tiers-payant, ce qui leur évite d’avancer des frais médicaux remboursables.
Comment obtenir le statut BIM ?
Le statut BIM est attribué de deux manières différentes :
- automatiquement dans certains cas, notamment pour les personnes bénéficiant d’un revenu d’intégration du CPAS, de la garantie de revenus aux personnes âgées (GRAPA), d’allocations familiales pour enfant souffrant d’un handicap ainsi qu’aux mineurs étrangers non accompagnés et aux orphelins.
- Sur la base d’un examen des revenus et suite à une demande introduite auprès de la mutualité.
Autres avantages BIM
Le statut BIM permet en plus de ces meilleurs remboursements santé de bénéficier d’autres avantages : tarif social pour les transports en commun (SNCB, STIB, TEC, De Lijn), accès à l’intervention du fonds social mazout, exonération de certaines taxes et redevances…
Infoljbh
Le mot du jour : la littératie, c’est quoi ?
Non, le terme ‘littératie’ n’est pas une traduction hasardeuse en néerlandais. Inspiré de l’anglais ‘litteracy’, le concept de littératie en santé renvoie à la capacité d’un individu à rechercher, comprendre et utiliser des informations de base sur la santé. Ces informations doivent permettre de comprendre les différentes options de traitement qui s’offrent à lui et de prendre des décisions éclairées concernant sa propre santé.
En Belgique, seules 6 personnes sur 10 comprennent correctement les instructions de leur médecin. Par ailleurs, la bonne observation des traitements dans le suivi des maladies chroniques n’est que de 50 % en moyenne.
Plus d’infos
Consultez le communiqué de presse des Mutualités Libres.